Le stage clown : un contenu pédagogique

En prenant la forme clownesque comme outil, ce stage propose d’amener l’acteur :
à reconnaître ce qui est et non ce qu’il voudrait qui soit,
à repérer ce qui le fait agir, à ouvrir l’imaginaire, à réveiller ses sens, à décloisonner les formes de son expression,
à le rendre disponible à lui-même, à renforcer son acuité, à fortifier ses intuitions, à reconquérir sa spontanéité,
à forger sa singularité en lui restituant la nature de ce qu’il produit, à développer le matériau de son jeu, à le mettre en forme,
à expérimenter de manière concrète le rapport qui s’installe entre le public et lui, et à découvrir les possibilités multiples de jeu que cela implique.

Description des exercices

Exercices physiques

Ils seront proposés chaque jour en début de séance, sur toute la durée du stage.
Comment le corps nous informe-t-il de ce que nous vivons ? Le corps, dans sa transparence, « trahit » nos sensations, nos sentiments, nos errances, par des signes que nous ne pouvons dissimuler. Quand nous tentons de les « masquer », pour contrôler l’image, c’est le masque qui apparaît au monde extérieur, et c’est à cette information-là que le monde répondra… et le jeu n’en finit pas. Comment prendre conscience de ces signes, en faire nos alliés afin qu’ils deviennent source de jeu sur la scène ?
La conscience du corps commence par la représentation que je m’en fais. Visualiser l’anatomie et particulièrement le squelette, approfondir la connaissance du corps, comprendre la dynamique naturelle du mouvement, permet de repérer les automatismes, les efforts et tensions inutiles et de chercher la fluidité du geste, de la voix et de libérer les émotions.
Parmi les techniques abordées, la Méthode Feldenkrais, le Mouvement Fonctionnel, La voix dans un travail inspiré de « Freeing the natural voice » de K. Linklater.

Un « corps dansant »

Avec Isabelle Pinon
Le travail que je propose vise à explorer comment s’accompagner de son propre corps.
Se rendre le plus possible présent à ce dernier, ouvrir tous les circuits de conscience et de mobilité du corps pour qu’il devienne ainsi un partenaire de jeu et non pas « à la traîne » derrière la tête.
Ce projet a de multiples facettes :
– Développer la conscience du corps, le rendre le plus disponible possible, explorer sa mobilité et jouer.
– Travail à deux ou en groupe à une des proposition(s) communes ou de dialogue entre deux personnes, deux corps.
– Explorer ce que le corps me propose de lui-même, le repérer et pouvoir en jouer.
– Aller jusqu’au bout d’une proposition corporelle, la développer, l’étirer jusqu’au bout, jusqu’à l’absurde…
– Jouer avec les mouvements que l’on connaît déjà (petits mouvements du corps, gestes quotidiens…)
– Donner du corps à un état intérieur, du son à un corps.

Tempo, écoute, tension/relâche, rythme

En danse, en musique, il y a des termes qui décrivent les caractéristiques de ce qui est donné à voir et à entendre sur une scène. La description d’un déplacement, d’un geste, d’une chanson se fait de manière précise.
Tout est rythme sur un plateau de théâtre, mais quel conscience en avons-nous ?
Il arrive souvent que deux personnes marchent ensemble et que, de manière fortuite, leurs pas soient rythmés en temps contre-temps.
Quand nous parlons, quand nous marchons, nous entendons-nous ? Pouvons-nous développer la capacité de percevoir les variations d’organisations, de rythme, de tempi, d’amplitude, d’orientation, etc. ?
L’exploration se sera proposée par des jeux de balles lancées, rattrapées, jeux de mains frappées, jeux de marches rythmées, divers jeux d’écoutes.

Le chœur

Les acteurs viennent se placer à égale distance les uns des autres autour d’un cercle tracé au sol. S’en suit un jeu d’équilibre et de déséquilibre du plateau devenu comme un champ magnétique où « toutes les forces » sont en jeu. Tout étant codifié, il n’y a rien à faire que de se regarder, de se nommer, d’aller se placer très précisément autour du cercle. Puis, chacun des acteurs devient à son tour protagoniste à l’intérieur du cercle. Il n’y a rien à « jouer », si ce n’est s’en tenir strictement aux règles du jeu et faire un pas, le reproduire. Est-il exactement le même ? Cette première approche permet de piéger les habitudes de comportement, de développer la concentration, la mémoire, en les soumettant à une série impressionnante de contraintes. Cet exercice révèle très vite à l’acteur son rapport à la règle, à l’émotion, à l’espace, au temps, à l’autre, au public. Dans le trouble qui surgit jaillit la matière que l’acteur confiera à son clown.
Le chœur masqué neutre
Le caractère solennel, protocolaire du Chœur masqué donne au moindre signe du corps toute sa valeur.
Il sacralise le geste qui s’accomplit et se déploie comme en un rituel. Il redonne tout son mystère à l’incarnation…
« Et le verbe s’est fait chair »… puis l’homme prit la parole.
Sous la neutralité du masque de cuir, le visage de l’acteur se met au repos. Notre regard se déplace. Il n’est plus distrait par la complexité de ce paysage sans cesse en mouvement que l’on nomme visage. Le corps soudain impose son langage. Dans cet exercice le corps dessine dans l’espace le geste en silence et dans le silence du geste il se fait verbe. Le regard de l’acteur isolé dans le masque ne se disperse plus, il gagne en profondeur et en mystère.
Nous découvrons alors que le corps a une existence propre, qu’il s’exprime sans doute la plupart du temps en toute indépendance et que nous ne lui prêtons guère attention. Le corps s’exprime d’autant plus directement qu’en général c’est lui qui est masqué.
L’acteur redécouvre un alphabet oublié qui a précédé l’apprentissage de la parole et cela lui donne conscience, dans l’intimité de l’instant que parfois les « langages » discordent. Il apprend à lire, en isolant le geste et en l’interrogeant, les contradictions qui d’ordinaire échappent : entre ce qu’il dit et ce qu’il vit.
L’acteur développe ainsi une conscience plus subtile dans le jeu.
L’oralité dans le chœur

avec Nathalie Rjewsky
Le chant, puis la parole apparaissent dans le chœur : l’acteur vient offrir à un partenaire qu’il ne quittera pas du regard une chanson. Puis une histoire qui lui tient à cœur. Dans le carcan des règles tout juste assimilées, l’émotion est puissante. Si je l’accueille, je constate alors que mon histoire se reconstruit au gré des images, des sensations qui me traversent. Ma pensée devient libre d’intervenir à tout moment pour sélectionner ou explorer un détail important. Quand l’émotion n’est plus une entrave, elle me connecte à une source vive, et la mémoire, dans l’intimité de l’instant, trouve sa propre logique, elle se nourrit de révélations immédiates. Je laisse le temps de l’écho en moi, en l’autre, à l’intérieur je pratique un « ralenti », je mène l’enquête, manie une « loupe » grossissante sur des détails qui n’ont l’air de rien : les mots surgissent et mon récit se structure au fil de mes émotions.
Comment raconter une histoire tout en restant à l’écoute de soi-même ? Comment se laisser surprendre et accueillir les sensations qu’elle fait surgir et qui la modèlent – sans se perdre, sans perdre le fil ?
Voyager à travers les images qui ont particulièrement frappé et laisser apparaître un point de vue

Le « Tu veux que je… D’accord je vais… »

Exercice du « Tu veux que je ? D’accord je vais » ou la fameuse règle des « trois secondes » avant d’agir. Comment prendre le temps de laisser surgir l’inconnu de soi, d’accueillir le flot d’émotions que cet espace suscite sans se précipiter dans l’action en évitant le sujet.

Le ping-pong

Découverte du Ping-pong, principe d’improvisation. Qui a le regard ? Qui agit le premier ? Vers quoi nous entraîne un pas, qu’il soit fait sur la droite ou sur la gauche ? Quelle signification ce déplacement a-t-il pour le partenaire, et quelle histoire, aussi simple soit-elle, va se tisser à partir de ces quelques signes ? Comment lire en l’autre les signes qu’il émet, reconnaître ce qu’ils me font vivre, lui répondre et ensemble créer ?

Principe d’improvisation
Le masque

Le masque expressif : improvisations en solo, en duos.
Masque de la tranquillité, le masque neutre offre de rendre visible ce que d’habitude l’on cache. Le moindre par le geste se révèle. (Le masque neutre est traité dans les paragraphes consacrés à l’exercice du chœur.)
Avec le masque expressif, le déploiement.
D’abord, le regarder. S’en inspirer. Ces orbites vides qui attendent des yeux. Le nez, la forme du nez, des arcades, du front, des joues… Ça, du masque, les rondeurs, le lisse et le rugueux, la couleur, le brillant, le mat, les reflets, le rythme des ombres et des lumières. Qu’est-ce que ça raconte, qu’est-ce que ça me dit, qu’est-ce que je vis de ça ?
Le tenir à bout de bras. Comme un marionnettiste. Un peu comme l’enfant qui fait bouger et parler sa poupée, son morceau de bois, objet inerte, qui par le seul mouvement prend vie.
Alors, lui faire regarder quelque chose, vite, lentement, de manière fluide ou saccadée… et parler, lui parler, le faire parler, lui prêter sa voix, sa parole.
Imaginer. L’imaginer. Par le mouvement, le mettre en image et en sensation, peut-être en émotions.
Penser rythmes, vitesses, sonorités, vibrations. C’est physique. Lui prêter son propre geste.
Dire ce qui traverse, ce qui se présente. De ce que l’on vit dans l’instant. Imaginer que, ce que l’on dit de soi, c’est peut être lui qui le dit. Penser que quand on lui fait dire quelque chose, c’est encore soi qui parle.
Ce qu’on dit, ce qui se dit, qui voudrait dire, qu’on voudrait dire, qu’on ne dit pas, ce qui dit… tout ça dit…
Tout mélanger. De soi, de lui. Se perdre.
Tenter, curieux, de se laisser surprendre, de se laisser happer par ce qui surgit. Donner libre cours à l’imagination. Surprise d’une voix qui surgit et qu’on n’a jamais entendue. Surprise d’un geste qui nous entraîne dans une danse inattendue. Surprise d’une parole.
Et, surtout, résister à l’idée que l’on se fait des choses. Résister à l’idée que derrière un masque il faille prendre « une » voix. Fixer le geste. Mais explorer les multiples possibilités.
Laisser le désir envahir.
Et à un moment, laisser le masque, s’emparer de soi. Observer et se laisser surprendre, se laisser guider.
Laisser l’émotion bouger le corps, modifier les sons, les timbres, les rythmes.
Chercher, dedans, la tranquillité qui autorise le geste, dehors. Loin de l’agitation.
Et le personnage ? C’est ce qui sera donné à voir et à entendre.

Le clown

Premières improvisations en clown avec un projet
La matière clownesque déjà mieux identifiée, on peut se glisser derrière un nez. Qui êtes vous ? Comment vous appelez vous ? Vous avez un projet dans l’existence ? … Répondant comme il peut à un flot de questions l’acteur lâche prise et le clown naît.
Peut-on soumettre au clown un sujet de réflexion, lui demander un point de vue sur le monde ?
S’il identifie dans l’instant ce qui le préoccupe et tente de nous le faire entendre, ce clown devient conteur malgré lui.
L’émotion qui surgit sera traitée dans le chant, dans le geste. À l’affût des moindres indices d’altération dans la texture de la voix, dans l’ébauche d’un geste, dans des paroles bredouillées, tout sera prétexte à métamorphose. Le corps sera chiffonné à coup de tours de piste, la matière sera triturée, jusqu’à l’ivresse, jusqu’à ce qu’elle livre son secret, jusqu’à ce qu’elle fasse sens.
Premiers duos
Je regarde l’autre comme un objet non identifié. Je tente d’avoir sur lui un regard de peintre et cherche le détail qui me frappe, comme dans l’histoire du chœur. J’oublie ce que je sais de lui. Je le regarde comme pour la première fois. Je devine son alphabet et tente d’entrer en contact avec lui à partir des signes qu’ils m’offrent et, non de l’idée que je m’en fais, je n’interprète pas son intention, je constate ce que sa présence me fait vivre. Alors, ensemble, sans perdre mon autonomie, nous créerons une histoire.

Le « refaire »

J’ai créé une « histoire », puis-je la re-présenter ?
Travailler l’improvisation pour réinventer la répétition. Refaire sans « refaire ». Reconnaître l’itinéraire. Je crée dans une improvisation, je suis auteur ; la demande est de refaire, la demande est d’être acteur, sans quitter l’auteur.
Au fil des semaines, il incombe à chacun, à partir des retours qui lui sont fait, de travailler à l’écriture des improvisations, non seulement d’écrire les mots et les faits, les situations et les actions, mais aussi, de travailler à ce que l’invisible apparaisse du visible… Faire sens dans l’écriture… L’idée n’existe que là où elle nous fait vivre… Là où elle nous renvoie à nous-même. Dans le « qu’est-ce que ça me dit… ? »
Dans le souvenir des origines, de ce qui a surgi, épurer, préciser…

Les « cours ouverts »

Des cours ouverts sont généralement proposé en fin de stage. Le travail se poursuit comme à l’accoutumée, si ce n’est que rien n’est tout à fait pareil. La présence d’un public nouveau met en relief le regard de connivence qui s’est installé durant le stage. Elles sont aussi l’occasion de se confronter à ce fameux quatrième mur, à expérimenter, comment la lecture des signes se modifie et, le trac aidant, comment les clowns sont galvanisés par ce nouvel enjeu.

Stage clown
De 1 à 8 semaines,
les différentes formules

Par le passé, nous avons pu proposer des stages long, jusqu’à 8 semaines effectives. Mais la nouvelle loi promulguée le 5 septembre 2018, pompeusement appelée « Loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel », a définitivement cassé la possibilité de ce type de proposition. Cette loi ne prend pas en compte la spécificité de nos métiers du spectacle vivant.
Les formules présentées ci-dessous sont susceptibles d’être adaptées en fonction des besoins des stagiaires.

Formation de cinq jours (une semaine)

Durant les sessions d’une semaine, l’exercice du chœur n’est pas proposé, la durée ne le permet pas.
1er jour
Découverte des exercices, le chœur, le « tu veux que je… », le ping-pong… apparition des règles du « jeu », émergence de la matière clownesque.
2e jour
Découverte des exercices, le chœur, le « tu veux que je… », le ping-pong… apparition des règles du « jeu », émergence de la matière clownesque.
Quand la règle du « jeu » devient outil pour donner forme à l’improvisation.
3e jour
Pratique des règles et de l’improvisation clown à partir de l’exercice du ping-pong
4e jour
Pratique des règles et de l’improvisation clown à partir de l’exercice du ping-pong
5e jour
Pratique des règles et de l’improvisation clown à partir de l’exercice du ping-pong

Formation de treize jours (deux semaines et demies)

1re semaine
Découverte des exercices, le chœur, le « tu veux que je… », le ping-pong… apparition des règles du « jeu », émergence de la matière clownesque.
2e semaine
La parole, le chant dans le chœur et improvisations en clown, solo, duo.
Les trois derniers jours peuvent comporter une ou plusieurs séances de cours ouverts.

Formation de 15 jours (trois semaines)

Ces trois semaines sont proposées en continu.
1re semaine
Découverte des exercices, le chœur, le « tu veux que je… », le ping-pong… apparition des règles du « jeu », émergence de la matière clownesque.
2e semaine
Quand la règle du « jeu » devient outil pour donner forme à l’improvisation.
Le masque neutre dans le chœur en improvisation.
La parole, le chant dans le chœur et improvisations en clown, solo, duo.
3e semaine
La parole, le chant dans le chœur et improvisations en clown, solo, duo.
La quatrième semaine comporte une ou plusieurs séances de cours ouverts.

Ces formules sont susceptibles d’être adaptées en fonction des besoins des stagiaires.
Avec Isabelle Pinon et / ou Nathalie Rjewsky, selon les sessions.

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